« Le Benelux est le berceau de Schengen »
La séance plénière de l’Assemblée interparlementaire Benelux de ce 13 juin 2025 sous présidence luxembourgeoise met l'accent sur les 40 ans des accords de Schengen et sur leur importance face aux défis actuels.

« Shengen n’est pas une invention européenne, c’est le Benelux qui est le berceau de Schengen ». C’est ce qu’a affirmé Francine Closener, Présidente du Parlement Benelux, lors de son allocution introductive aux débats de cette séance plénière du Parlement Benelux placée sous le signe des accords emblématiques qui ont mené à la libre circulation dans l’espace européen que nous connaissons aujourd’hui. Pour Francine Closener, ce cadre est essentiel pour la croissance, l’emploi et l’innovation et « Renoncer à Schengen, c'est renoncer à ces bénéfices ».
« l’Europe heureuse sera plus forte que l’Europe peureuse ».
La Présidente a été rejointe dans son propos par Robert Goebbels, ancien secrétaire d’État aux Affaires étrangères du Grand-Duché du Luxembourg et cosignataire de l’Accord de Schengen le 14 juin 1985.
Robert Goebbels a affirmé que les accords de Schengen ont été un « accélérateur pour la sécurité, la liberté et la justice pour des millions d’européens » leur permettant « de travailler, d’étudier et de vivre ». Ils auraient apporté des « droit précieux » tels que ne les connaissent « aucun autre continent ». Robert Goebbels a poursuivi en fustigeant les initiatives qui visent à réintroduire, au mépris des accords européens, des contrôles aux frontières au sein de l’UE. Il a fait part de son optimisme pour l’avenir de la perception de la liberté de circulation par les citoyens d’Europe, affirmant que « l’Europe heureuse sera plus forte que l’Europe peureuse ».
Les échanges entre parlementaires ont continué autour d’un état des lieux « de l’acquis Schengen dans les pays du Benelux et dans l'UE » et d’un débat thématique « les accords Schengen face aux défis actuels - perspectives d’avenir et rôle des pays du Benelux ».
Demain, 14 juin, les membres du Parlement Benelux se rendront à Schengen pour une cérémonie marquant la signature de l’Accord de Schengen du 14 juin 1985.
Retrouvez le replay (dès disponibilité) et l'ordre du jour de la séance :
Le Benelux et les 40 ans de l’accord de Schengen : un peu d'histoire
Au début du XXe siècle : Fin des frontières ouvertes
La circulation de personnes entre différents territoires était généralement libre avant la Première Guerre mondiale. Les Etats possédaient ni la volonté, ni les moyens nécessaires pour contrôler systématiquement les flux de personnes à travers leurs frontières. Cette situation voyait un changement pendant la Première Guerre mondiale. Des contrôles systématiques furent installés et restaient, accompagnés de controverses publiques, en force même après la fin de la guerre.
28 octobre 1920 : Loi « destinée à endiguer l’affluence exagérée d’étrangers sur le territoire du Grand-Duché »
La loi du 28 octobre 1920 établissait que chaque étranger devait posséder un passeport et un visa pour entrer au Luxembourg. Elle reflète l’esprit général de renforcement des frontières à l’époque. Notamment, la Société des Nations avait défini, également en octobre 1920, pour la première fois des normes internationales quant aux passeports lors de la conférence de Paris sur les passeports, formalités douanières et billets directs.
5 mars 1922 : Convention d’Union économique belgo-luxembourgeoise (UEBL)
L’UEBL peut être considérée comme premier antécédant de l’espace Schengen. Après la dissolution de l’union douanière allemande, le Luxembourg cherchait la coopération économique avec un de ses autres voisins. Une convention à cette fin a été signée avec la Belgique le 25 juillet 1921 et promulguée le 5 mars 1922. Elle visait, à côté de diverses coopérations douanières, monétaires et économiques, à « écarter toute entrave à la libre circulation des personnes ».
21 octobre 1943 : Convention monétaire néerlando-belgo-luxembourgeoise
La coopération étroite entre le gouvernement luxembourgeois et le gouvernement belge continue en exil lors de la Deuxième Guerre mondiale. Après un rapprochement au gouvernement néerlandais, les trois nations décident de créer une union monétaire. Celle-ci entre en vigueur le jour même de sa signature.
1er janvier 1948 : Convention douanière néerlando-belgo-luxembourgeoise
Une convention douanière fait suite à la convention monétaire conclue en 1943. Elle est signée le 5 septembre 1944 et entre en vigueur le 1er janvier 1948. Le 5 septembre 2024, à l'occasion du 80e anniversaire du Benelux, a été célébrée pour la première fois la Journée du Benelux, une journée placée sous le signe des liens qui unissent la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg. Dorénavant, chaque année, le 5 septembre sera marqué par la célébration de la Journée Benelux.
1er janvier 1958 : La Communauté économique européenne (CEE)
Le traité instituant la CEE, signé le 25 mars 1957 par les six pays Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg et Pays-Bas, contient un article visant « l’abolition, entre les Etats membres, des obstacles à la libre circulation des personnes ». Le traité ne contient pas de dispositions sur un abandon éventuel des contrôles frontaliers de personnes. La CEE prend corps le 1er janvier 1958.
3 février 1958 : Signature du traité sur l’Union économique Benelux
Le traité instituant l’Union économique Benelux est signé le 3 février 1958 et entre en vigueur le 1er novembre 1960. Il constate également l’intention de réaliser la « libre circulation des personnes » sans y attacher un plan d’abandon pour les contrôles frontaliers de personnes.
1er juillet 1960 : Convention concernant le transfert du contrôle des personnes vers les frontières extérieures du territoire du Benelux
La convention concernant le transfert du contrôle des personnes vers les frontières extérieures est signée le 11 avril 1960 et entre en vigueur le 1er juillet 1960. Elle vise la suppression des contrôles aux frontières intérieures des pays Benelux, déclenchant un processus de démantèlement progressif dans les années à venir.
28 janvier 1971 : Le protocole relatif à la suppression des contrôles et formalités aux frontières intérieures du Benelux et à la suppression des entraves à la libre circulation
Ce protocole, signé le 29 avril 1969 et entré en vigueur le 28 janvier 1971, attribue au Comité des Ministres du Benelux la compétence de prendre des décisions sur la suppression des contrôles aux frontières intérieures, ainsi accélérant le démantèlement des derniers contrôles en place.
12 décembre 1984 : Les gouvernements du Luxembourg, de la Belgique et des Pays-Bas proposent aux gouvernements de l’Allemagne et de la France de joindre leur espace sans contrôles frontaliers de personnes
Cette initiative a été prise à la suite d’un accord de cessation progressive de contrôles frontaliers de personnes signé entre la France et l’Allemagne le 13 juillet 1984.
14 juin 1985 : Signature de l’accord de Schengen
L'accord de Schengen est signé le 14 juin 1985, à bord du Princesse Marie-Astrid, par les pays du Benelux, l'Allemagne et la France. Initialement prévu pour entrer en vigueur cinq ans après sa signature, l'accord n'a finalement été mis en œuvre par les Communautés européennes que le 26 mars 1995. Il a fallu attendre le Traité de Maastricht pour que l'accord de Schengen soit intégré dans le cadre institutionnel européen.