La fiscalité internationale au cœur des discussions

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Publié le 01.02.2022 à 01h00 Mis à jour le 16.08.2022 à 18h05

Les députés de la Commission des Finances et du Budget se sont entretenus ce mardi 1er février avec la Ministre des Finances Yuriko Backes au sujet de la position du Luxembourg sur la réforme fiscale internationale. Cet échange a eu lieu à l’initiative du député Laurent Mosar (CSV).

En début d’année, les députés avaient reçu Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Au cours des discussions, les députés ont abordé la question de la mise en place d’un taux d’imposition minimum commun de 15% pour les grandes entreprises telle que proposée par l’OCDE et qui a abouti à un accord global entre 137 juridictions en octobre 2021.

 

Un impact certain mais difficilement quantifiable à l’heure actuelle

Yuriko Backes a d’emblée rappelé que les services financiers ne tombent pas dans le champ d’application du pilier 1, qui porte sur la réattribution partielle des droits d'imposition. Il s’agit donc d’une bonne chose pour la place financière luxembourgeoise, a noté la ministre. En revanche, le pilier 2 concerne plus d’acteurs puisqu’il touche toutes les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 millions d’euros. Ce second pilier, qui doit introduire un taux d’imposition minimal international de 15%, concernerait un certain nombre d’entreprises opérant au Luxembourg. C’est ici qu’un effet pourrait se faire sentir pour l’économie luxembourgeoise, a souligné la ministre, même si l’impact est difficilement quantifiable à l’heure actuelle. En revanche, le secteur des fonds d’investissements en est exclu, a noté Yuriko Backes avec satisfaction.

 

La Ministre des Finances a également rappelé que la Commission européenne a proposé le 22 décembre dernier une directive visant à garantir un taux d'imposition effectif minimum mondial de 15% pour les grands groupes exerçant leurs activités dans l'Union européenne. Lors de la dernière session du Conseil "Affaires économiques et financières" (ECOFIN), toutes les délégations, dont le Luxembourg, ont soutenu cet objectif ambitieux, a noté la ministre.

 

Quel impact pour les SOPARFI ?

A la demande du député Laurent Mosar, la Ministre des Finances est également revenue sur le sujet des sociétés dites « boîtes aux lettres », contestées au niveau européen. Yuriko Backes a informé les députés que la Commission européenne entend lutter contre le recours abusif à ce type de structure et aurait fait une proposition en ce sens en date du 22 décembre 2021. La proposition en question devrait garantir, selon la Commission européenne, que les entités de l'Union européenne qui n'ont pas ou peu d'activité économique ne puissent bénéficier d'aucun avantage fiscal et n'imposent aucune charge financière aux contribuables.

 

La ministre et les députés étaient d’accord sur le fait qu’une telle mesure aurait un impact non-négligeable sur l’économie luxembourgeoise. Le député Laurent Mosar a rappelé que ceci présente un danger non seulement pour les sociétés de participations financières (SOPARFI), qui sont directement visées, mais pour toute une branche qui compte également des cabinets d’avocat et des sociétés de conseil. De manière générale, le député regrette la politique menée par la Commission européenne en ce sens puisqu’elle nuirait énormément à l’économie luxembourgeoise et à la compétitivité de l’Union européenne. Yuriko Backes a rassuré les députés qu’elle a d’ores-et-déjà entrepris des démarches au niveau européen afin de défendre la position du Luxembourg et qu’elle poursuivra ses efforts en ce sens à l’avenir. Le député Laurent Mosar s’est montré satisfait de la position de la ministre et de manière générale, les députés sont d’avis qu’il est important d’adopter une position commune avec le gouvernement afin de défendre les intérêts nationaux. La Ministre des Finances a cependant souligné que rien n’a encore été entrepris au niveau européen, puisque la priorité de la présidence française de l'Union européenne résiderait actuellement dans la mise en œuvre du pilier 2 de l’accord de l’OCDE.

 

Quelques députés se sont questionnés sur l’impact d’une telle mesure sur les recettes de l’Etat luxembourgeois. Yuriko Backes a proposé de leur fournir en temps voulu les derniers chiffres des recettes engendrées par l’activité des SOPARFI, tout comme de tenir la Commission des Finances et du Budget informée sur l’évolution de ce dossier.

Débat autour de l’imposition minimum à 15%

Pascal Saint-Amans est haut-fonctionnaire et spécialiste de la fiscalité.

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