Un déficit public de 3 milliards d’euros en 2029 au lieu de 1,3 milliard ?
Des représentants du Conseil national des finances publiques (CNFP), menés par le Président du CNFP Romain Bausch, ont présenté aux députés leur évaluation des finances publiques à l’occasion des travaux sur le projet de budget 2026 et le projet de budget pluriannuel.
Parmi les points ayant suscité des questions auprès des députés, la non prise en compte dans les prévisions budgétaires pluriannuelles de deux éléments importants : la future réforme des classes d’imposition et les dépenses de défense exigées du Luxembourg dans le cadre de ses engagements auprès de l’OTAN, qui devraient atteindre 5 % du revenu national brut (RNB) en 2035.
Une « forte incertitude, en raison d’un contexte macroéconomique international fragile et instable » liée à la persistance de tensions géopolitiques et commerciales. C’est ainsi que les représentants du CNFP ont défini la situation macroéconomique lors de l’introduction de leur évaluation, présentée aux députés de la Commission des Finances ce mardi 18 novembre.
850 millions d’euros par an pour la réforme fiscale, entre 440 et 880 millions d’euros supplémentaires pour la défense en 2029
Au-delà de son analyse des facteurs comme la croissance, l’inflation, l’évolution du marché du travail et la situation budgétaire de l’administration centrale, le CNFP a choisi de relever deux points spécifiques.
Le CNFP souligne ainsi que ni l’impact de la future réforme des classes d’imposition (prévue pour entrer en vigueur en 2028), ni l’effort supplémentaire requis en matière de défense dans le cadre de l’OTAN n’ont été pris en compte dans les prévisions budgétaires du gouvernement.
Même si cela s’expliquerait par le fait que le budget pluriannuel est établi à législation constante, le CNFP estime que ces deux éléments se traduiront à moyen terme par une charge importante pour les finances publiques.
Le CNFP évalue l’impact de la réforme fiscale à 850 millions d’euros par an. En ce qui concerne les efforts de défense, le CNFP a calculé une augmentation progressive de 0,3 % du RNB par an (de 2 % en 2025 à 5 % en 2035) qui résulterait en un effort supplémentaire de 880 millions d’euros pour l’année 2029 (pour un total de 2,1 milliards d’euros entre 2026 et 2029), ou de 440 millions d’euros en 2029 (pour un total de 1,9 milliard d’euros entre 2026 et 2029) si le Luxembourg parvenait à limiter l’augmentation des efforts de défense à 3,5 % du RNB en tout. Cela serait possible en classant des dépenses actuellement comptabilisées dans d’autres postes du budget de l’État dans les 1,5 % du RNB prévus par l’OTAN pour des dépenses de défense « non essentielles ».
Le déficit des administrations publiques pourrait ainsi, selon le CNFP, se situer entre 2,6 et 3 milliards d’euros en 2029, au lieu des 1,3 milliard d’euros prévus dans le budget pluriannuel 2025 – 2029. Cela à moins que « ces coûts ne soient compensés par des économies et/ou par des recettes additionnelles ».
Faut-il « découpler » le budget d’un exercice annuel du projet de budget pluriannuel ?
La discussion a encore porté sur l’opportunité, comme le suggèrent les représentants du CNFP, de « découpler » les discussions sur le budget de celles qui se font en même temps sur la programmation financière pluriannuelle lors des travaux annuels sur le budget. Interrogé par les députés sur les raisons de cette idée, Romain Bausch a confirmé que, selon lui, les discussions pluriannuelles ont tendance à « sombrer » derrière celles qui concerne le budget de l’année à venir. Discuter la programmation financière pluriannuelle plus tard, par exemple au printemps, permettrait de travailler de manière détachée de la situation budgétaire imminente et d’appréhender le moyen terme de manière plus utile.
Les échanges ont également porté sur la compétitivité du Luxembourg et sur l’avenir des recettes, sur la soutenabilité des dépenses publiques, mais aussi sur les impacts potentiels de l’adoption de l’intelligence artificielle, notamment dans les secteurs porteurs d’emploi.
Les représentants du CNFP ont encore milité pour que la Chambre des Députés prenne en charge une étude sur le fonctionnement du secteur public, notamment en tenant compte des impacts de l’intelligence artificielle et des autres thèmes liés à la digitalisation, afin de regarder cette problématique de manière globale et d’en tirer des conclusions pour l’avenir. « C’est quelque chose que la Chambre pourrait faire pour amener plus de transparence » a affirmé Romain Bausch.