Budget 2026 : les analyses de la CSSF sur les secteurs des banques et des fonds d’investissement
Les députés de la Commission des Finances ont reçu des représentants de la Commission de Surveillance du Secteur Financier (CSSF), dont son Directeur général Claude Marx et son Directeur Claude Wampach.
Ils les ont entendus principalement sur deux grands blocs qui tombent sous la mission de contrôle de la CSSF : les banques et l’industrie des fonds.

5.950 milliards d’euros d'actifs gérés au Luxembourg
Le domaine des fonds représente la grande majorité des revenus fiscaux liés à la taxe d’abonnement. Celle-ci devrait passer de 1,28 milliard d’euros en 2024 à 1,35 milliard d’euros en 2025, a souligné Claude Marx. Une progression de 5 % dans le secteur. On estime également que les gestionnaires de fonds d’investissement payent 1 milliard d’euros dans le cadre de l’Impôt sur le revenu des collectivités (IRC), amenant le total des revenus liés au secteur à 2,3 milliards d’euros, une part substantielle du budget de l’État.
Le nombre de fonds d’investissement installés au Luxembourg serait passé de 3.200 il y a un an à 3.100 aujourd’hui. Cependant, la masse d’avoirs gérés aurait augmenté, s’établissant à 5.950 milliards d’euros fin août 2025. 52 demandes pour l’installation de nouveaux fonds seraient en cours d’instruction.
La concurrence entre le Luxembourg et l’Irlande, qui ensemble représenteraient deux tiers du marché des fonds européens, a été abordée. Les députés ont interrogé les représentants de la CSSF sur ce point, soulignant que la proportion de fonds en Irlande augmentait plus rapidement que celle du Luxembourg. Claude Marx a expliqué dans ce contexte que le marché des ETF (Exchange-Traded Fund), des produits populaires, se développe actuellement mieux en Irlande. Cela serait notamment lié à un traité de non-double imposition favorable entre l’Irlande et les États-Unis.
Le Luxembourg serait quant à lui très bien placé en ce qui concerne la croissance des fonds alternatifs, de la finance privée et du private equity.
La CSSF sceptique sur une surveillance européenne centralisée des produits financiers
Parmi les risques évoqués pour l’avenir, le fait que certains pays européens voudraient revoir les directives européennes pour réduire les types de produits dans lesquels les pays peuvent investir et souhaiteraient une surveillance centralisée de tous les produits financiers par l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) à Paris. Les représentants de la CSSF se sont dit sceptiques quant à ces approches, arguant notamment que les fonds fonctionnent avec des spécificités régionales et qu’il était difficile de confier cette mission à une autorité centrale, sauf à créer un appareil énorme et couteux.
Claude Marx a encore souligné qu’il existe actuellement une bonne coopération entre les autorités de surveillance en Europe. Celles-ci feraient des actions communes, des évaluations entre pairs et des collèges de supervision.
Un autre point abordé a été celui de l’Union des épargnants et des investissements (SIU), un projet européen visant à amener les citoyens à investir leur épargne dans l’économie réelle afin de soutenir des secteurs comme la défense ou la digitalisation. Actuellement, seul 10% de l’épargne est investie ainsi, contre 40% aux États-Unis. La discussion a porté sur l’opportunité d’une loi « RAU » (avantages fiscaux selon les investissements) mais au niveau européen. Interrogés par les députés, les représentants de la CSSF ont affirmé qu’une des conditions du succès d’une telle initiative sera de la baser sur des produits intelligibles pour les consommateurs.
Les députés ont interrogé les représentants de la CSSF au sujet de l’implantation au Luxembourg de sociétés gérant des cryptoactifs, qui sont actuellement au nombre de 3, avec 16 demandes supplémentaires en cours d’examen. Les représentants de la CSSF ont insisté sur le fait que la qualité des acteurs était un critère central pour une autorisation.
Simplifier mais pas déréguler le système bancaire
Lors de la partie de l’échange consacrée au secteur bancaire, Claude Wampach a affirmé que les banques voyaient toujours un intérêt pour venir au Luxembourg. Une demi-douzaine de procédures seraient en cours et à un stade très avancé, principalement pour des établissements originaires de l’extérieur de l’UE.
Les députés se sont notamment renseignés sur le thème de la régulation et de l’opportunité de simplifier les procédures dans le secteur. Les représentants de la CSSF ont affirmé que les règles actuelles étaient un résultat direct de la crise de 2008. C’est notamment le cas en matière de capitalisation et de liquidités dont les banques doivent disposer à tout moment si les épargnants souhaitent retirer leurs économies.
Ces règles assurent la stabilité du secteur bancaire, ont souligné les représentants de la CSSF. Le moment serait cependant opportun de mener une réflexion sur le nombre de règles et pour voir si certaines ne sont pas obsolètes. Il s’agirait ainsi de simplifier les opérations quotidiennes sans fragiliser le système bancaire ou procéder à une dérégulation, ce qui serait la mauvaise direction, ont-ils affirmé.
La CSSF se veut « agnostique » sur son rôle de prononcement des sanctions et sur qui encaisse l’argent des amendes qu’elle prononce
Actuellement, la CSSF prononce elle-même les sanctions et récupère le montant des amendes qu’elle inflige en cas de non-respect des règles financières après avoir mené une enquête. Les députés avaient remis cette pratique en question, notamment dans le cadre d’une précédente réunion à la Chambre.

Les dépenses totales du Ministère des Finances dans le projet de budget 2026 sont estimées à 1,553 milliard d’euros, dépenses courantes et dépenses en capital comprises.
Interrogés par les députés à ce sujet, les représentants de la CSSF ont affirmé ne pas avoir de préférence en la matière et ne pas voir d’objection à ce que ce système soit changé, soulignant que l’autorité n’utilisait pas l’argent en question dans son budget. Si une autre autorité devait être amenée à prononcer les sanctions et à encaisser l’argent, la CSSF a cependant émis le souhait que cela « ne retarde pas les procédures d’une année ou deux ».