Peut-on restreindre l’accès à la propriété immobilière aux étrangers non-résidents au Luxembourg ?

Note de recherche scientifique
Publié le 22.03.2024 à 09h17 Mis à jour le 22.03.2024 à 10h37

Cette note de recherche de la Cellule scientifique propose une analyse de la faisabilité juridique et économique d’une loi sur le modèle de la loi suisse « Lex Koller ». 

 

Peut-on restreindre l’accès à la propriété immobilière aux étrangers non-résidents au Luxembourg ?
  • La Lex Koller a une efficacité relative en tant qu’instrument de lutte contre la crise du logement en Suisse. Les restrictions qu’elle prévoit sont, en effet, de plus en plus réduites. Cela peut témoigner d’une certaine inadaptation des instruments mis en place.
  • Si d’un point de vue économique, l’application de la Lex Koller a eu un impact sur le marché de l’immobilier suisse en contribuant à sa stabilité, le postulat au fondement de cette loi, selon lequel il y aurait une corrélation entre l’immigration et la hausse des prix de l’immobilier en Suisse, est de moins en moins correct.
  • Au Luxembourg, d’un point de vue économique, le postulat de départ qui pourrait justifier l’adoption d’une loi sur le modèle de la Lex Koller suisse n’est pas vérifié. L’acquisition de la propriété immobilière par les étrangers ne constitue pas un facteur explicatif de la crise du logement ou de la hausse des prix. Les investissements étrangers jouent plutôt un rôle de dynamisation de l’économie luxembourgeoise.
  • Les informations recueillies et analysées par l’Observatoire de l’habitat permettent de confirmer que des personnes physiques détiennent la majorité de la propriété foncière au Luxembourg.
  • D’un point de vue juridique, la compatibilité d’une législation sur le modèle de la Lex Koller avec l’ordre juridique luxembourgeois ferait défaut. Le régime de l’autorisation préalable à l’acquisition de la propriété au Luxembourg auquel seraient soumis les étrangers non-résidents ne pourrait trouver de justifications admissibles au regard des engagements européens et internationaux du Luxembourg. Du point de vue du droit interne, dans le cas où le propriétaire souhaite vendre son bien, une législation sur le modèle de la Lex Koller ne semble pas compatible avec la liberté du propriétaire de choisir son cocontractant.
  • Quant à l’articulation entre l’objectif d’une loi sur le modèle de la Lex Koller et la législation fiscale, l’analyse des projets de réforme foncière, actuellement en discussion devant la Chambre des Députés, met en évidence un effet désincitatif des instruments fiscaux sur la conservation de logements vacants et la détention non-productive de foncier à des fins spéculatives, au Luxembourg. Cet effet vise indifféremment les Luxembourgeois comme les étrangers
  • Outre son incompatibilité potentielle avec l’ordre juridique luxembourgeois, une loi sur le modèle de la Lex Koller n’apporterait pas une solution adaptée à la pénurie de logements au Luxembourg.